▶ Les bâtiments
Du début des années 1700 à la Révolution, les "Eudistes" (autrefois "Congrégation de Jésus et de Marie") occupèrent "une maison de quatre arpens à l’image de la Tourette" au 20 de la rue dont ils avaient reçu la nue-propriété de la part de la veuve de Paul Bain. La maison fut une "hôtellerie ecclésiastique" en même temps que le séminaire de la congrégation (in Lefeuve - Bibliographie ref #H16 - Tome 5 p 427-8). Après le décès du Père Hébert et de l’Abbé Lefranc, victimes parmi d’autres de la folie révolutionnaire des "massacres de septembre", la congrégation est dissoute le 5 avril 1792.
La maison fut ensuite achetée par les Visitandines, très présentes dans ce quartier, avant qu'elle ne soit vendue aux Jésuites qui avait reçu de Pie VII en 1814 la permission de se reconstituer. De la même manière, les bâtiments du "Séminaire Anglais" occupés depuis 1687 par des religieux d'Angleterre, d'Irlande et d'Ecosse, sous l'invocation de Saint-Grégoire-le-Grand furent supprimés à la Révolution et constituèrent une partie des locaux de Sainte-Geneviève. Au final l'Ecole occupa à partir d'avril 1854 les terrains situés entre le 8 et le 26 rue Lhomond formés d'une suite de couvents et d'hôtels. Une bibliothèque de 60 000 livres est constituée et la revue "Etudes" y sera créée. Les bâtiments servent de résidence aux jeunes Jésuites qui font des études scientifiques et des savants comme Cauchy, Ampère ou Biot viennent leur donner des cours.
Situation de l’Ecole Sainte-Geneviève avant le percement de la rue Courcelle-Seneuil, devenue Erasme in L’Illustration - Janvier 1930
Plan de masse de l'ancienne école à Paris
in "L'école Sainte-Geneviève 1854-2004" - R@PE 2004 - Page 12
▶ L'histoire
Former, dans un environnement chrétien, des cadres de haut niveau scientifique, tel était le but de cette école qui faisait partie de l’enseignement secondaire, mais ne rassemblait que des classes préparatoires aux grandes écoles.
Les Jésuites auraient désiré ouvrir des établissements d’enseignement supérieur, mais la loi Falloux promulguée le 15 mars 1850 ne permettait l'ouverture que d'établissements secondaires. Tenant compte du fait que les classes de préparation aux grandes écoles relèvent juridiquement de l’enseignement secondaire, l’autorisation est demandée de fonder un établissement dédié seulement aux classes de mathématiques élémentaires et des classes préparatoires. Malgré les réserves du Supérieur Général des Jésuites, l’Ecole est fondée rue des Postes, elle ouvre en avril 1854 dans une maison de formation des jeunes jésuites où se trouvent les premiers collaborateurs de la toute nouvelle revue "Etudes".
Jusqu’en 1861, les "Math’ Elem’" sont majoritaires et les effectifs augmentent rapidement : dix ans après la fondation, il y a plus de 300 élèves ; et les résultats suivent : le premier élève reçu à Polytechnique, en 1857, a droit à un Te Deum à la chapelle !
Les Jésuites poursuivent l'objectif de rechristianiser la société française à partir de ses élites, en se tournant vers les milieux de l’armée, puis vers les ingénieurs, quand progresse l’industrialisation du pays.
Le Père de Ponlevoy s.j. a rendu compte en détail des exactions criminelles de la Commune dans son ouvrage publié en 1871 chez Tequi. Ce livre est mis en ligne et téléchargeable par les soins de la bibliothèque de Harvard. Le chapitre "Les arrestations" commence à la page 20.
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En février et mars 1880, Jules Ferry fait voter des lois tendant à la laïcisation de l'enseignement et visant à empêcher les membres des congrégations non autorisées à participer à l'enseignement. Jusqu’à cette époque, les Jésuites assurent la direction et presque tout l’enseignement.
La fin du siècle est agitée : les Jésuites, expulsés de l’Ecole en 1880 en conséquence des décrets de Jules Ferry, tentent d’y revenir à partir de 1887. Mais la loi de Juillet 1901 interdisant l’enseignement aux membres d’une congrégation non autorisée, les derniers jésuites quittent la rue Lhomond.
En 1905, est votée la Loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’Ecole est menacée de perdre ses meubles et immeubles. Malgré tout, le dynamisme ne se dément pas : en 1907, est créé la préparation à l’Institut national agronomique et la même année est fondé l’Institut économique, qui fermera en juillet 1913 et dont la relève sera assurée sous le nom d’ESSEC à l’Institut Catholique de Paris.
Le 21 août 1913, après plusieurs procès, l’Ecole de "la rue des Postes" est confisquée, les portes sur ce site sont définitivement fermées après 59 années de vie intense. Le 1er octobre suivant, à Versailles, dans une propriété construite par les Sœurs du Cénacle, est installée la "Nouvelle Ecole Sainte-Geneviève, ancienne rue des Postes". A la suite de l’action de la DRAC (Droits des religieux anciens combattants), les lois de 1901 s’assouplissent : en 1931, le père Gabriel de Boissieu devient le premier recteur Jésuite à Versailles.
L'école à Versailles en 1935
L'école à Versailles en 2005
Ecole Saint-Geneviève
Du 8 au 26
Après le départ de l'Ecole en 1913, et après la guerre de 14-18 pendant laquelle les locaux furent dédiés à l'Hôpital du Panthéon. Les bâtiments furent rasés et reconstruits en 1932 comme laboratoires pour l'ENS, à l'exception de la chapelle construite par Jules-Godefroy Astruc (qui fut également, plus tard, l'architecte de la Basilique du Christ-Roi érigée dans le jardin des Bénédictines du Saint-Sacrement, un peu plus loin dans la rue, au numéro 33) dans un style néo-gothique, inaugurée le 13 mai 1894 désormais dévolue au rite maronite, et dont le chevet apparaît au 10 de la rue. La grille de l'entrée principale de la chapelle, rue d'Ulm, serait un vestige de l'Hôtel de Jugné qui s'élevait au numéro 18.
Le célèbre "Lycée Privé Sainte-Geneviève" ("Ginette") est installé depuis la rentrée scolaire 1913 à Versailles au 2, rue de l'Ecole des Postes (ex-rue de la Vieille Eglise). Ce n'est évidemment pas anodin et renvoie aux origines de l'établissement quand il s'appelait encore "Ecole Sainte-Geneviève".
Le 20 rue des Postes vers 1850
Vers 1907
Bâtiment de l’Ecole
Ex-monastère des Visitandines
Tour des polytechniciens
Entrée de la chapelle
Future ND du Liban
Documents des collections de la Bibliothèque historique de la ville de Paris
Pendant la guerre de 1870, l’Ecole est transformée en service ambulancier. Puis, très vite, c’est le soulèvement de la Commune. Dans la nuit du 3 au 4 avril 1871, la maison est cernée par un bataillon de Fédérés. Ils arrêtent le recteur, le père Ducoudray, sept professeurs Jésuites, quatre frères Jésuites et sept employés. Le 24 mai, les pères Ducoudray, Olivaint, Caubert, de Bengy et Clerc sont fusillés sur le chemin de ronde avec l’archevêque de Paris, Mgr Darboy.